Grande étude FCCQ
Depuis plusieurs années, le Québec est globalement dans une situation de déficit d’entretien de ses infrastructures routières, de mobilité durable et intermodales pour le transport des marchandises. Elles ont grandement besoin d’amour et d’investissement, ce qui suscite présentement des préoccupations à plusieurs égards.
La FCCQ a insisté à maintes reprises sur l’importance, auprès des instances gouvernementales, d’allouer des fonds pour la préservation des actifs. Néanmoins, ces montants ne sont pas suffisants pour satisfaire les besoins des diverses régions du Québec, afin de maintenir les services existants. À titre d’exemple, les sommes prévues pour le maintien des actifs en transport collectif au Plan québécois des Infrastructures (PQI) qui ont reculé de 3,8 G $ en 2018 à 2,8 G $ en 2023.
Cette grande étude fait suite une série de consultations réalisées dans les 17 régions du Québec au printemps et a pour objectif d’alerter sur la nécessité de maintenir en bon état nos infrastructures de transport.
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Le Québec fait face à un important déficit de maintien d’actifs (DMA) pour plusieurs infrastructures de transport, soit les routes, les ponts, le transport collectif, les aéroports, les ports, les traversiers, etc. Pour l’essentiel, un DMA survient lorsque l’entretien d’une infrastructure est insuffisant en regard de son état physique et de son utilisation. Cela peut être dû à un sous–financement, une planification inadéquate, un manque de ressources humaines ou matérielles, ou d’autres raisons.
Si le DMA est un terme technique qui peut sembler abstrait, ses conséquences négatives sur la durabilité, la sécurité et la capacité d’utilisation sont bien réelles, comme l’évoquent ces trois exemples récents et médiatisés de défaillance d’infrastructures :
Les investissements publics en infrastructures de transport se répartissent en ajout de nouvelles infrastructures et en maintien des actifs existants. Dans le Plan québécois des infrastructures 2024-2034, environ 64 % des sommes prévues pour le réseau routier, le transport en commun et les autres types de transport, l’étaient au titre du maintien d’actifs4. Cela signifie que le reste, donc plus du tiers budgété, était programmé pour le développement de nouvelles infrastructures de l’ajout de capacité et ce, même s’il subsiste un DMA des infrastructures existantes. Or, cela implique non seulement que des coûts d’entretien futurs devront être engagés pour maintenir ces nouvelles infrastructures, mais aussi que le DMA existant est appelé à croître, avec les risques de dégradation et, au pire, de défaillance que cela comporte.
Dans ce contexte, la Fédération des chambres de commerce du Québec a mandaté AppEco pour analyser les conséquences économiques du DMA en transport au Québec afin de lui permettre de produire des recommandations visant à le réduire.
L’état des infrastructures de transport au Québec a été évalué à partir de données provenant de plusieurs organismes, tels que Statistique Canada et le ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD). Il ressort que peu de données existent sur l’ensemble des infrastructures, à l’exception du réseau routier. Ce portrait couvre l’âge, l’état, le déficit de maintien d’actifs (DMA) et les investissements nécessaires pour les infrastructures étudiées.
Le Québec présente un âge moyen pondéré des actifs de transport inférieur à celui de l’Ontario et de la moyenne canadienne, à l’exception des infrastructures maritimes et routières. En moyenne, les ponts et tunnels ont 51 ans, tandis que près de 66 % des actifs routiers ont été construits entre 1960 et 1980. La durée de vie utile restante des actifs au Québec est généralement supérieure à la moyenne canadienne.
Sur environ 26 000 km de routes, 77,4 % sont en bon état selon l’indice de rugosité. Cependant, l’indice d’état gouvernemental médian révèle une note négative « D » pour la majorité des régions. Les disparités régionales sont notables, avec un réseau routier particulièrement déficient en Abitibi-Témiscamingue et Chaudière-Appalaches. Environ 23 % des structures sont jugées déficientes, mais l’état général est légèrement meilleur que pour les routes.
Le déficit de maintien d’actifs du réseau routier a atteint 19,3 milliards de dollars en 2022, en hausse de 37 % par rapport à 2014. Bien que des investissements importants aient été réalisés, notamment dans les ponts et chemins de fer, le DMA reste préoccupant. Le rapport du Vérificateur général du Québec indique que la moitié des chaussées sont en mauvais état, soulignant un besoin urgent d’interventions.
Les prévisions de dépenses pour résorber le DMA montrent une tendance à la baisse dans les derniers plans d’infrastructure. Malgré une augmentation des investissements pour le réseau routier, les prévisions pour le transport collectif et maritime restent faibles. Sans un engagement accru dans le maintien et la résorption du DMA, le Québec risque de continuer à être en retard par rapport aux autres provinces canadiennes.
Bien que le Québec affiche un âge moyen des infrastructures routières plus jeune que d’autres provinces, la proportion d’infrastructures en mauvais état demeure préoccupante. Des efforts substantiels doivent être faits pour améliorer l’entretien et la résorption du DMA afin d’assurer un réseau de transport efficace et durable. Philippe Noël, vice-président Affaires publiques et économique, FCCQ
À la lecture de l’étude produite par AppEco, la FCCQ propose 10 recommandations à l’intention des ordres de gouvernement, soit les gouvernements du Québec, fédéral et les municipalités, pour s’attaquer réellement au déficit de maintien des actifs, et assurer la pérennité des infrastructures de tous les modes de transport au Québec :
Vu la dégradation actuelle des infrastructures de transport, les ordres de gouvernement doivent d’abord prioriser deux types d’investissements dans leur planification des infrastructures, soit les travaux visant à résorber le déficit de maintien d’actifs (DMA) et l’entretien adéquat des actifs existants ;
L’ajout de nouvelles infrastructures de transport peut se justifier économiquement s’il s’effectue à un rythme plus modéré, dans un souci d’une absence importante advenant une évolution démographique, et seulement si le financement actuel et futur d’entretien de l’ensemble des actifs est assuré ;
Un portrait précis de l’état de toutes les infrastructures de transport, incluant leur DMA, doit être réalisé rapidement afin de prioriser les investissements et ce, pour tous les ordres de gouvernement. Ce portrait devrait être publié et mis à jour sur une base annuelle.
La planification des travaux d’infrastructures devrait tenir compte de leur état physique et de leur cycle de vie, des disponibilités budgétaires, des volumes de circulation, de la sécurité des déplacements et des communautés, des conséquences environnementales (GES, autres externalités), etc.
Les infrastructures routières hors des grands centres devraient obtenir davantage d’attention des gouvernements qu’actuellement, car plusieurs d’entre elles sont dans un état particulièrement détérioré.
Puisque c’est avec le scénario 6 qui propose le meilleur ratio avantage/coûts, le gouvernement du Québec devrait favoriser cette option, tel qu’indiqué dans l’étude.
Que les ordres de gouvernement accordent une plus grande attention dans leur planification à la résorption du DMA dans les infrastructures de mobilité durable, notamment le gouvernement fédéral afin qu’il consacre une part importante aux sommes comprises dans le Fonds permanent pour le transport en commun, pour ainsi prendre en compte les besoins de maintien d’actifs en transport en commun et aide à combler l’écart de rattrapage dans les investissements à réaliser tout en s’assurant de maintenir le niveau de service et de sécurité requis au sein de leurs infrastructures. Aussi, que le Québec ait sa juste part pour répondre aux besoins en termes de transport collectifs et ruraux.
Que le Secrétariat du Conseil du trésor présente le plus rapidement possible, les règlements modifiant les modes d’octroi de contrats dans les processus d’appel d’offres, afin que ceux-ci privilégient des critères de qualité, d’innovation, d’expertise, de durabilité et de performance environnementale, en incluant le prix, plutôt que le recours systématique au plus bas soumissionnaire conforme. En plus d’inciter davantage d’entreprises québécoises à soumissionner sur les contrats publics de l’État québécois, nous bénéficierons collectivement des innovations retrouvées dans nos entreprises, et maximiserons la durée de vie des infrastructures de transport avec des procédés. Se donner pour objectif que dans les cinq prochaines années, qu’une majorité de contrats publics en matière de transports, utilisent ces critères dans les projets de réhabilitation de nos infrastructures de transport au Québec.
Considérant que le développement de nouvelles infrastructures en transport collectif s’annexerait aux infrastructures déjà existantes, les investissements destinés au maintien d’actifs doivent être rapidement bonifiés et pérennisés pour assurer un service intermodal qui opérerait au sommet de la capacité projetée.
Les programmes gouvernementaux québécois suivants devraient être prolongés ou réactivés, en plus d’être bonifiés:
Découvrez les enjeux et infrastructures prioritaires propres à chacune des 17 régions du Québec
Les infrastructures de transport font partie intégrante de notre tissu économique, et plus largement, du quotidien de tous les Québécois. Tout le monde est appelé à utiliser à un moment ou un autre, un mode de transport pour se déplacer efficacement, d’un point A à un point B. Pour les entreprises, en plus de la main-d’œuvre et des déplacements par affaires, les mouvements de marchandises dépendent d’infrastructures de transport efficaces et fonctionnelles.
Pour plusieurs localités, perdre l’accès à une route, à un pont ou à un aéroport, peut enclaver la population et entraîner des répercussions importantes. Pour les travailleurs qui doivent se déplacer, c’est une question de fiabilité. Pour nos échanges commerciaux, c’est notre accès aux biens, mais aussi notre réputation qui est en jeu.
La présente étude met en lumière que nos routes sont globalement dans un piètre état, un constat qui se voit malheureusement à l’œil nu. Cependant, les implications derrière cette situation doivent être soulevées, car la question suivante devient complexe : par où commencer ? La modélisation et la littérature de cette étude font état de la réalité à laquelle le Québec est confronté, mais aussi, des possibilités de scénario pour nous rediriger collectivement.
Nous arrivons essentiellement à la même conclusion qui s’applique à tous les autres modes de transports ou presque : on doit accroître l’intensité de nos efforts collectifs en ce qui a trait à l’entretien des infrastructures de transport.
En assurant un maintien plus adéquat et continu des capacités existantes, de même qu’une réelle volonté de résorber le déficit en la matière, le gouvernement éviterait des coûts beaucoup plus élevés dans le futur et maximiserait les retombées économiques et sociales pour la société. Cela est vrai pour nos routes, mais aussi pour le transport collectif et les infrastructures assurant l’intermodalité des déplacements de personnes et de marchandises, comme les aéroports, les chemins de fer et les ports maritimes, pour ne nommer que celles-ci. Le tout avec pour objectif d’assurer la pérennité de l’ensemble des infrastructures de transport au Québec, et ainsi, retrouver notre fierté lorsque vient le moment d’utiliser celles-ci pour ses déplacements.
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