Lettres ouvertes
16 octobre 2023
Lettres ouvertes
16 octobre 2023
Alors que nous entamons aujourd’hui à la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) une visite des capitales belge et française, plus de six années se sont déjà écoulées depuis la signature de l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne. Les bénéfices au Québec sont patents, alors que nos exportations de biens vers nos partenaires européens atteignent désormais plus de 10 milliards de dollars annuellement et que nos investissements mutuels entre les deux continents ne cessent d’augmenter.
Ceci dit, nous aurions tort de nous asseoir sur nos lauriers. Plusieurs changements géopolitiques, financiers et réglementaires commandent notre attention afin de s’assurer d’optimiser les retombées de cet accord que nos décideurs ont, à juste titre, tant souhaité. De nouvelles occasions émergent et il faut mieux les saisir.
Par exemple, puisque l’Union européenne travaille à sa réindustrialisation et à la diversification de ses sources d’approvisionnement en matières premières, les industries québécoises de l’aluminium, du fer, du nickel et du cuivre, ainsi que nos créneaux émergeants dans les filières des matériaux critiques et stratégiques, ont ici une occasion rêvée de mettre en valeur le savoir-faire québécois. Aussi, l’entrée en vigueur provisoire, cet automne, du « Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières » européen, qui s’appliquera notamment à l’aluminium, au fer et à l’acier pourrait s’avérer avantageux pour nos industries, dont l’empreinte carbone est déjà inférieure à celle de leurs concurrents.
Autre point de vigie : la vigueur de l’industrie aérospatiale européenne et son virage vers la carboneutralité. Qui de mieux placé que nos fleurons dans ce créneau pour écrire cette nouvelle page du transport avec nos amis européens ?
Finalement, les efforts européens de relocalisation industrielle en matière de microélectronique et d’énergie verte (batteries, éolien, solaire, hydrogène, biocarburants) pourraient nous permettre de faire d’une pierre deux coups : diversifier nos propres sources d’approvisionnement dans ces domaines et ouvrir de nouveaux marchés pour nos filières en émergence et nos industries établies, de la batterie à la machinerie industrielle en passant par le matériel électrique.
D’un autre côté, force est d’admettre que l’AECG soulève quelques inquiétudes en matière de balance commerciale québécoise, en particulier dans le secteur agroalimentaire. Plusieurs acteurs importants du secteur n’arrivent tout simplement pas à rivaliser avec les plus grands joueurs européens, désormais présents sur notre marché. L’exemple des produits fromagers en est un frappant, lorsque nous comparons la pénétration des produits européens sur notre marché à celle de nos produits sur les marchés du Vieux Continent. Malheureusement, trop d’entreprises québécoises de ce secteur souffrent des prix agressifs proposés par de grands producteurs européens en sol québécois. Des producteurs fromagers d’ici n’arrivent plus à concurrencer les producteurs européens, entre autres quant aux marges de profits générés par ces produits pour nos détaillants.
De l’autre côté de l’Atlantique, nos entreprises agroalimentaires québécoises peinent souvent à faire leur place. En plus des règles plus contraignantes en matière de salubrité, le manque d’ouverture des réseaux de distribution européens explique en bonne partie notre difficulté à approcher l’équilibre commercial. Le secteur souhaite être entendu par nos gouvernements sur cette position précaire.
Chaque accord commercial comporte sa part inhérente de bénéfices et de défis. Nos décideurs doivent demeurer activement à l’écoute de la communauté d’affaires pour réussir à tirer le meilleur profit de ses ententes. Le Québec a un vecteur de communication de choix en ce sens avec son impressionnant réseau de délégations à l’étranger, nos exportateurs ont tout avantage à utiliser leur expertise et leur connaissance du terrain. Une pleine collaboration de nos milieux économiques et politiques ne peut que profiter à nos PME et nos grandes entreprises qui souhaitent conquérir le marché européen et donner vie à notre leitmotiv : être une nation exportatrice.
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