Lettres ouvertes
6 novembre 2016
Lettres ouvertes
6 novembre 2016
À l’heure où les questions liées à l’approvisionnement, la production, la mise en valeur et la consommation énergétique occupent une place importante dans le débat public, nous devons réagir au rapport du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) sur le projet de stockage de gaz naturel liquéfié pour l’alimentation de la centrale thermique de TransCanada Energy (TCE), située dans le parc industriel de Bécancour. Ce projet vise à répondre aux besoins de puissance exprimés par Hydro-Québec en période de pointe hivernale.
Tout en soulignant les vertus environnementales du projet proposé par Gaz Métro Solutions Énergie (GMSÉ), le BAPE conclut que l’actuel gazoduc auquel la centrale est déjà reliée constituerait une option pouvant être réalisée à un coût et dans des délais de livraison similaires, tout en offrant, au final, plus de flexibilité. Le projet de site de stockage pour lequel il a reçu le mandat d’enquêter est donc inacceptable à ses yeux.
Il est pour le moins surprenant que le BAPE se commette à de pareilles affirmations, alors que l’information fournie dans le cadre des audiences qu’elle a menées sur le projet démontrait tout le contraire. Le promoteur a notamment fait état de travaux importants devant être effectués en amont du gazoduc, ce qui rend cette option non-réalisable aux coûts estimés et dans les délais souhaités. Il est étonnant que les commissaires n’en tiennent pas compte.
Mais ce qui nous apparaît davantage préoccupant, c’est le rôle que s’octroie le BAPE dans l’examen qu’il fait de ce projet. En concluant que l’approvisionnement en gaz naturel de la centrale par gazoduc peut se faire à un coût semblable au projet sur lequel il devait se pencher, le BAPE se substitue au promoteur à qui il revient pourtant de faire l’analyse des coûts et des bénéfices associés à son projet. Aux dernières nouvelles, c’est encore aux promoteurs que reviennent la responsabilité de constituer un plan d’affaires et d’assumer les risques qui y sont associés. Nous devons encore reconnaître à ces derniers leur capacité à défendre l’opportunité économique de leurs projets!
La FCCQ l’affirme depuis des années : si, par son mandat, le BAPE peut se pencher sur les questions économiques, force est de constater qu’il ne possède ni les ressources, ni l’expertise nécessaires pour mener à bien cet exercice. Pour preuve, les commissaires ne tiennent pas compte des mêmes éléments lorsqu’ils comparent les deux options d’approvisionnement. Les coûts liés au projet proposé par GMSÉ prennent en considération les frais d’utilisation de la centrale TCE, alors que les commissaires omettent de les inclure lorsqu’ils concluent que l’option d’alimentation par gazoduc peut se réaliser à coût similaire. Il s’agit là d’une illustration parfaite du manque d’expertise du BAPE en matière économique.
L’examen des projets énergétiques doit se faire dans une perspective de développement durable. La FCCQ a toujours appuyé ce principe et le BAPE peut jouer un rôle en ce sens. Cela ne suppose toutefois pas que l’examen des considérations environnementales liées à un projet se fasse au détriment des variables économiques associées à celui-ci.
Il est temps que le Québec se dote d’un organisme crédible, qui aura pour mandat de documenter et de clarifier les aspects économiques de certains grands projets de développement, de programmes ou d’activités économiques. À l’heure où l’acceptabilité sociale est fréquemment invoquée, nous croyons que la diffusion d’une information neutre, basée sur des faits, demeure le principal outil pour mieux expliquer les enjeux associés à certains projets, notamment les projets énergétiques.
Le Livre vert du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles sur l’acceptabilité sociale énonce une orientation qui vise spécifiquement à renforcer sa capacité d’analyse des impacts et des retombées économiques. Le plus récent rapport du BAPE doit l’amener à poser un geste en ce sens et ce, le plus rapidement possible.
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